Pour l’instant, il y a très peu de jurisprudences et d’accords concernant la conciliation entre le forfait-jours et l’astreinte.
En effet, bien que l’autonomie des salariés conditionne l’application des forfaits en jours aux intéressés, il est possible de les soumettre, avec leur accord, à des astreintes, quand bien même ces dernières comportent par nature des contraintes d’emploi du temps. Encore faut-il qu’elles s’inscrivent dans le prolongement normal de la mission du collaborateur concerné.
Par ailleurs, additionnées aux temps travaillés, les astreintes ne doivent pas conduire à des durées non raisonnables de travail comme le rappelle la cour européenne des droits de l’homme (19-5-21).
Enfin, les temps d’interventions éventuelles ne doivent pas conduire à « entamer » la durée minimale des repos journaliers et hebdomadaires.
Le salarié en forfait en jours qui effectue des astreintes bénéficiera des mêmes contreparties que les autres.
Les temps d’intervention effectués pendant une période d’astreinte se déroulant au cours d’une journée où le salarié a par ailleurs exécuté des activités professionnelles n’ont aucun impact sur le nombre de jours travaillés lorsque la journée en question est déjà comptabilisée au titre du travail effectué. En revanche, ce ne sera pas le cas si l’astreinte coïncide avec un jour de repos. Le temps d’intervention devrait alors être comptabilisé comme une journée ou demi-journée travaillée, et ce quelle que soit sa durée.
Comme le rappellent les tribunaux, autonomie ne signifie pas totale indépendance.
Pour la Cour de cassation, l’astreinte ne semble pas incompatible avec le forfait annuel en jours (Cass. soc., 12-7-18, nº17-13029).
Dans cette affaire, un directeur d’agence qui reste en permanence disponible à l’aide de son téléphone portable en dehors de ses heures de travail réclame à son employeur un rappel d’indemnité d’astreinte prévue par accord collectif. Il invoque notamment l’absence de dispositions relatives aux astreintes dans son contrat de travail, et le fait qu’il soit soumis à un forfait annuel en jours qui n’est pas de nature à dispenser l’employeur du règlement de l’astreinte. La question de la compatibilité de l’astreinte avec le forfait en jours n’est pas directement posée à la Cour de cassation, mais cette dernière fait droit à la demande du salarié. Elle considère qu’il est bien en astreinte du fait que son employeur en charge des appels d’urgence dispose spécifiquement de ses coordonnées dans le document « Procédure des gestions des appels d’urgence », et qu’en sa qualité de directeur d’agence, il doit rester en permanence disponible à l’aide de son téléphone portable pour répondre à d’éventuels besoins, et se tenir prêt à intervenir si nécessaire.